Les libanais, plus influents que l’on pourrait croire… - 10/12/2012
L’Egypte, dite « Oum al Dounia » ; que doit-elle au petit Liban ?
Pour deux villes qui ont beaucoup en commun, Beyrouth et Le Caire ne pouvaient pas être plus différentes l’une de l’autre. L'une est une petite ville balnéaire, perchée sur les contreforts de la montagne libanaise, tandis que l'autre est une véritable mégapole coupée en deux par le mythique fleuve du Nil.
Pourtant, l’Egypte et plus particulièrement Le Caire doivent une grande partie de leur modernité à leurs voisins Levantins.
Les familles de Beyrouth et son arrière-pays, qui s’étend jusqu’à Damas, autrefois petite province de la Grande Syrie (avant que les français eurent l’idée de créer deux pays distincts), ont émigré en Égypte au début du XIXe siècle, lorsque la Syrie était ravagée par la famine et l'Égypte était gouvernée par Mohammad Ali et commençait à se libérer de l'Empire Ottoman. Ils sont venus en masse au milieu du XIXe siècle, contribuant ainsi à la Renaissance égyptienne sous les Khédives et plus tard sous les derniers rois qui ont gouverné l'Égypte, avant le coup d’état de 1952.
Ce qui a attiré ces familles, dénommées «shawam» ou «gens du Mont-Liban» par les Égyptiens, qui ne faisaient aucune distinction entre Libanais, Syriens et Palestiniens ; c’était la possibilité de faire fortune. Pour beaucoup d'entre eux qui étaient nantis et instruits (dans de nombreux cas par des missionnaires européens et américains), l’Egypte offrait des opportunités qui n'existaient pas en ce temps-là au Liban. De la construction du canal de Suez à la création du centre-ville moderne du Caire, les dirigeants de l'Égypte ont entamé une frénésie de dépenses qui a attiré les migrants à travers le monde.
Parmi eux se trouvaient quelques-uns des plus grands noms du Liban ; des familles comme les Nahas, les Sednaoui, les Mitre, les Khouri, les Zidane, les Tueini, les Gemayel, les Chiniara et bien d'autres. En raison de ce contexte, les Égyptiens conservent aujourd'hui une perception des Libanais comme étant plus occidentalisés, sophistiqués et très doués ; même trop doués, murmurent d’aucuns à voix basse lorsqu’il s’agit du monde des affaires.
Tout au long du XXe siècle, les égyptiens d’origines libanaises présents dans toutes les couches de la société égyptienne, ont dominé le monde de la culture.
En 1881, deux frères libanais, Sélim et Bechara Takla ont fondé le quotidien le plus prestigieux d'Égypte, Al-Ahram (Les Pyramides).
Les familles libanaises possédaient de nombreuses maisons d'édition comme Dar al-Hilal (1892), ce qui leur permettait de contrôler l’industrie de la presse et leur accordait une énorme influence sur la vie culturelle du pays.
Même Rose al-Youssef, la quintessence figure de la culture égyptienne de la première moitié du XXe siècle, était à l'origine shamia. L’irrévérencieux magazine politique et littéraire, qu’elle avait fondé à l’époque continue jusqu'à à ce jour d’être publié.
En 1926 Antoine Chiniara, alors secrétaire général de la fédération du football en Egypte fonda « Match », le premier hebdomadaire sportif illustré au Moyen Orient.
Le théâtre et la chanson étaient d'autres professions dans lesquelles les artistes libanais avaient un pied. Le grand crooner du cinéma égyptien des années 1950, Farid al-Atrache, était libanais. Sa sœur, la chanteuse Asmahan rivalisait avec la star égyptienne Umm Kulthoum, à tel point que des rumeurs vicieuses se sont mises à circuler au sujet de sa mort accidentelle, accusant tel ou tel de complot.
Le plus célèbre des cinéastes égyptiens, Youssef Chahine, est également d'origine syrienne.
Même la culture architecturale du Caire a été imprégnée par une certaine influence libanaise. L'architecte le plus prolifique dans le centre du Caire entre les années 1930 et 1960, Antoine Nahas Sélim, est considéré comme le premier architecte moderniste en Egypte.
Ce dernier avait construit entre autres bâtiments importants le Musée National de Beyrouth, et conçu des bâtiments pour un nombre d’égyptiens célèbres et fortunés, souvent des shawam comme lui.
Suite à la nationalisation de toutes les entreprises par le gouvernement de Gamal Abdel Nasser dans les années 1950, la plupart de la communauté libano-syrienne s’est sentie obligée de quitter le pays des pyramides.
Mais même dans l'Egypte contemporaine, la communauté libanaise conserve son influence sur certains aspects de l’industrie culturelle et touristique. À titre d’exemple, la propriétaire du restaurant le plus célèbre du Caire, Nisha Sursock, elle-même membre d’une célèbre famille beyrouthine.
A en croire le nouveau régime post-Mubarak, les avoir nationalisé par les soldats dans les années 50 vont être restitues à leurs anciens propriétaires. Peut-être verrons-nous bientôt un retour aux sources par les descendants de ces anciens pionniers, les shawam du début du siècle dernier.
E.C
Pour deux villes qui ont beaucoup en commun, Beyrouth et Le Caire ne pouvaient pas être plus différentes l’une de l’autre. L'une est une petite ville balnéaire, perchée sur les contreforts de la montagne libanaise, tandis que l'autre est une véritable mégapole coupée en deux par le mythique fleuve du Nil.
Pourtant, l’Egypte et plus particulièrement Le Caire doivent une grande partie de leur modernité à leurs voisins Levantins.
Les familles de Beyrouth et son arrière-pays, qui s’étend jusqu’à Damas, autrefois petite province de la Grande Syrie (avant que les français eurent l’idée de créer deux pays distincts), ont émigré en Égypte au début du XIXe siècle, lorsque la Syrie était ravagée par la famine et l'Égypte était gouvernée par Mohammad Ali et commençait à se libérer de l'Empire Ottoman. Ils sont venus en masse au milieu du XIXe siècle, contribuant ainsi à la Renaissance égyptienne sous les Khédives et plus tard sous les derniers rois qui ont gouverné l'Égypte, avant le coup d’état de 1952.
Ce qui a attiré ces familles, dénommées «shawam» ou «gens du Mont-Liban» par les Égyptiens, qui ne faisaient aucune distinction entre Libanais, Syriens et Palestiniens ; c’était la possibilité de faire fortune. Pour beaucoup d'entre eux qui étaient nantis et instruits (dans de nombreux cas par des missionnaires européens et américains), l’Egypte offrait des opportunités qui n'existaient pas en ce temps-là au Liban. De la construction du canal de Suez à la création du centre-ville moderne du Caire, les dirigeants de l'Égypte ont entamé une frénésie de dépenses qui a attiré les migrants à travers le monde.
Parmi eux se trouvaient quelques-uns des plus grands noms du Liban ; des familles comme les Nahas, les Sednaoui, les Mitre, les Khouri, les Zidane, les Tueini, les Gemayel, les Chiniara et bien d'autres. En raison de ce contexte, les Égyptiens conservent aujourd'hui une perception des Libanais comme étant plus occidentalisés, sophistiqués et très doués ; même trop doués, murmurent d’aucuns à voix basse lorsqu’il s’agit du monde des affaires.
Tout au long du XXe siècle, les égyptiens d’origines libanaises présents dans toutes les couches de la société égyptienne, ont dominé le monde de la culture.
En 1881, deux frères libanais, Sélim et Bechara Takla ont fondé le quotidien le plus prestigieux d'Égypte, Al-Ahram (Les Pyramides).
Les familles libanaises possédaient de nombreuses maisons d'édition comme Dar al-Hilal (1892), ce qui leur permettait de contrôler l’industrie de la presse et leur accordait une énorme influence sur la vie culturelle du pays.
Même Rose al-Youssef, la quintessence figure de la culture égyptienne de la première moitié du XXe siècle, était à l'origine shamia. L’irrévérencieux magazine politique et littéraire, qu’elle avait fondé à l’époque continue jusqu'à à ce jour d’être publié.
En 1926 Antoine Chiniara, alors secrétaire général de la fédération du football en Egypte fonda « Match », le premier hebdomadaire sportif illustré au Moyen Orient.
Le théâtre et la chanson étaient d'autres professions dans lesquelles les artistes libanais avaient un pied. Le grand crooner du cinéma égyptien des années 1950, Farid al-Atrache, était libanais. Sa sœur, la chanteuse Asmahan rivalisait avec la star égyptienne Umm Kulthoum, à tel point que des rumeurs vicieuses se sont mises à circuler au sujet de sa mort accidentelle, accusant tel ou tel de complot.
Le plus célèbre des cinéastes égyptiens, Youssef Chahine, est également d'origine syrienne.
Même la culture architecturale du Caire a été imprégnée par une certaine influence libanaise. L'architecte le plus prolifique dans le centre du Caire entre les années 1930 et 1960, Antoine Nahas Sélim, est considéré comme le premier architecte moderniste en Egypte.
Ce dernier avait construit entre autres bâtiments importants le Musée National de Beyrouth, et conçu des bâtiments pour un nombre d’égyptiens célèbres et fortunés, souvent des shawam comme lui.
Suite à la nationalisation de toutes les entreprises par le gouvernement de Gamal Abdel Nasser dans les années 1950, la plupart de la communauté libano-syrienne s’est sentie obligée de quitter le pays des pyramides.
Mais même dans l'Egypte contemporaine, la communauté libanaise conserve son influence sur certains aspects de l’industrie culturelle et touristique. À titre d’exemple, la propriétaire du restaurant le plus célèbre du Caire, Nisha Sursock, elle-même membre d’une célèbre famille beyrouthine.
A en croire le nouveau régime post-Mubarak, les avoir nationalisé par les soldats dans les années 50 vont être restitues à leurs anciens propriétaires. Peut-être verrons-nous bientôt un retour aux sources par les descendants de ces anciens pionniers, les shawam du début du siècle dernier.
E.C