La fuite des cerveaux: la véritable raison de l’endiguement socio-économique du Liban - 22/04/2013
Tout le monde le sait et il n’y a plus de honte à en parler : les libanais quittent le Liban avec de moins en moins d’hésitation… et reviennent rarement. Les chiffres sont clairs là-dessus : pour environ quatre millions d’âmes au Liban, on estime le triple dans le monde, avec déjà plus de huit millions de personnes d’origine libanaise en Amérique latine. Nombreux sont les libanais qui prospèrent loin de leur pays, créant de véritables réseaux là où ils s’installent. Bien que la finalité soit la même, chacun a une histoire différente : Certains ont poursuivi leurs études supérieures à l’étranger pour y rester après avoir trouvé un emploi stable et prometteur. D’autres sont passés par les universités libanaises pour quitter le pays juste après. Enfin, n’oublions pas les libanais qui ont grandi à l’étranger et qui ne trouvent pas en eux une raison d’appartenir à un pays qu’ils voient à peine et qui leur paraît trop hostile. Pourtant tous possèdent un nom de famille (et dans certains cas un accent bien reconnaissable) qui n’échappe pas à l’oreille de leurs compatriotes et une carte d’identité marquée d’un cèdre.
Nous n’avons pas le droit de nous acharner sur ces hommes et ces femmes qui ont perdu confiance en leur pays et qui tiennent à pouvoir nourrir leur famille qui y demeure. Nous ne pouvons pas non plus blâmer l’état qui voit fuir ses ressortissants mais qui ne peut promouvoir l’attractivité d’un marché du travail délabré à cause justement de la fuite de futurs dirigeants d’entreprises. Le Liban est bel et bien dans un cercle vicieux et la question est de pouvoir le rompre. Rien n’est facile pour le Liban et, comme toujours, cela prendra du temps et un effort collectivisé. Tout d’abord, du côté public, il est urgent de pouvoir concevoir la situation avec plus de détails. Le Liban a un institut de statistique (l’Administration Centrale de la Statistique) qui doit cependant pouvoir disposer de fonds plus importants et surtout de directives claires. Il y a trop d’estimations démographiques et peu d’informations réelles au Liban. Il est difficile d’agir sur un terrain inconnu et le gouvernement ne devrait pas hésiter à renforcer la recherche statistique du pays. Du côté du privé, le cas n’est pas désespéré mais cela nécessite, encore une fois, un effort collectif. L’économie du Liban a des bases et on ne le rappelle jamais assez : ce n’est pas un pays naissant mais un pays en reconstruction. Les libanais continueront à quitter tant qu’ils ne voient pas d’opportunité de travail. Investir au Liban relève du risque il est vrai, mais peut rapporter beaucoup dans un petit pays capable, grâce à sa population relativement basse, de voir s’épanouir des projets ambitieux. Il ne manque plus que la motivation. C’est à ceux que le public libanais écoute de faire leur part et de faire imaginer le futur plutôt que de pousser à haïr le présent. Rien ne peut être construit avant de n’avoir été imaginé. Il faut rêver et il faut croire.
Un jour un libanais à Paris se dira qu’il sera mieux installé à Beyrouth. Beaucoup le suivront.
C.G
Photo: culturesdorient.blog.fr