Courage, ingéniosité et persévérance: les Arméniens du Liban - une communauté à grande histoire, qui fait honneur au pays des Cèdres
29/04/2013
Les Arméniens du Liban : l’exemple d’une intégration entièrement réussie
La présence arménienne au Liban date du XIXe siècle et résulte d'une série de vagues migratoires au cours desquelles les Arméniens ont été forcés hors de leur nation. Ce processus d’immigration a atteint son apogée avec le génocide de 1915.
En 1926, on dénombrait près de 75.000 Arméniens au Liban.
Entre 1937 et 1940, une nouvelle et plus grande vague de réfugiés arméniens est arrivée au Liban à partir d’Alexandrette, suite à l'annexion de cette région par la Turquie et l'évacuation du Sandjak par les forces françaises. L’immigration arménienne a continué dans les années 1940 à partir de la Palestine, suite aux tensions israélo-arabes, et enfin au début des années 1960 en provenance de Syrie en raison de la montée des sentiments nationalistes arabes opposés aux droits culturels et éducatifs des minorités.
Les Arméniens du Liban, sont aujourd’hui des citoyens libanais à part entière. A travers les années, ils ont joué un rôle important dans le maintien de l’équilibre politique et ont contribué à maintenir une «répartition équitable» des postes politiques et administratifs, dans un pays où la paix politique est basée sur dosage savant entre chrétiens et non-chrétiens.
Dans les années qui ont précédés les évènements tragiques de 1975, les Arméniens avaient atteint un degré significatif de prospérité économique. Ils avaient pratiquement monopolisé le commerce du tapis en Orient, grâce à leurs relations privilégiées avec les marchés de Constantinople et de Londres.
Ils se sont aussi distingués à plus d’un niveau : commerce, artisanat, art, science, presse et littérature.
“Industrieux par nature ” les Arméniens sont réputés “spécialisés” dans certains corps de métiers de haute précision. Ils ont excellé comme tailleurs, bijoutiers, coiffeurs, horlogers et cordonniers. En plus de leur remarquable talent d’artisans, les Arméniens ont énormément contribué à l’essor culturel et artistique du Liban, notamment dans le monde de la musique, de la peinture, du cinéma, de la presse et de l’éducation dont le phare est la fameuse université Haigazian, à Ras Beyrouth.
Le Liban est fier de ses artistes tel le comédien Pierre Chammassian appelé le « Docteur en Comédie », le grand compositeur et pianiste dont les prodiges ont fait le tour du monde, Guy Manoukian, l’activiste politique et chanteur-compositeur du groupe américain de rock « System of a Down », Serj Tankian , le peintre Krikor Agopian qui a participé à plus de 125 expositions à travers le monde, une première pour un artiste de la région et qui a été un des premiers à reprendre en peinture le maniérisme humaniste de la Renaissance.
Nul ne peut oublier les années 1960, quand le Liban fut le premier pays Arabe à commencer à envoyer des fusées dans le ciel. Sous l’initiative de l’arménien Manoug Manoukian, un professeur de physique auprès de l’université Haigazian.
De plus, le Liban compte plusieurs stars de télévision de descendance arménienne, qui cartonnent dans la région, tel Paula Yacoubian et Zaven Kouyoumdjian de Future Television, Nishan Derharoutyounian qui a animé des talk-shows populaires sur NTV, LBC et MBC, et la scénariste de Telenovela Claudia Marchalian.
Ceci est le résultat d’une centaine d’années de courage, de persévérance, de travail acharné, d'une grande autonomie et d’une ingéniosité entrepreneuriale - des attributs qui avaient bien servi les Arméniens dans leur longue histoire de survie contre vents et marée.
Toutefois, le bien-être économique n'a pas été accompagné d'un sentiment de contentement et de bonheur. Plusieurs facteurs ont quand même contribué au désenchantement de la diaspora arménienne au Liban, y compris ;
- l’instabilité qui a régné au Liban suite aux hostilités qui ont débuté dans les années 70,
- la peur de ne plus jamais pouvoir retourner dans leur pays,
- la préoccupation persistante à la menace d’une perte de l'identité arménienne,
- le sentiment omniprésent de politique d'impuissance en raison de l'absence d'indépendance nationale, et
- le profond sentiment de perte et d'indignation face à la Turquie pour son refus persistant de reconnaissance du génocide arménien.
En 1983, le Liban comptait près de 175,000 arméniens, la plus grande communauté en dehors de l'Union soviétique et des États-Unis. Ceci explique en partie pourquoi pendant longtemps le Liban fut appelé la « deuxième Arménie ».
Pendant la guerre civile qui a ravagé le Liban pendant 15 ans (de 1975 à 1990), la communauté arménienne a joué la carte de «neutralité positive». Ce qui pendant longtemps n’a pas été apprécié par certaines factions qui voyaient en la guerre une bataille entre musulmans et chrétiens.
Toutefois, la neutralité arménienne a payé. Tout au long des années de guerre, Bourj Hammoud, un quartier à majorité arménienne sur le bord de Beyrouth, est restée intacte, même pendant les plus lourds tirs d'artillerie contre cette partie du territoire. Malgré cela, des milliers de libano-arméniens, comme beaucoup d'autres libanais ont cherché refuge au Canada, aux États-Unis, en France, et dans d'autres pays occidentaux.
Toutefois, la survie des Arméniens n’est pourtant pas dépourvue de défis.
Ils font partie des quelques grands peuples dans le monde, qui comptent plus de membres dans la diaspora que dans leur propre pays.
Pour plus d'une centaine d'années, plus de la moitié des sept millions d'Arméniens dans le monde ont été soumis à des changements et des fluctuations idéologiques, linguistiques, socio-économiques, et plus récemment à la mondialisation, le consumérisme, la situation post-coloniale et post-communiste.
Le rouleau compresseur de la mondialisation qui avance à la vitesse de la lumière et la transformation du monde en un melting-pot culturel, préoccupent au plus haut niveau les Arméniens qui ont peur de perdre leur identité ethnique, linguistique et culturelle, qu’ils ont réussi à préserver, jusque-là, plus ou moins intacts et qu’ils ont défendus à corps et à cris, même au prix de leur sang.
Au Liban, la communauté arménienne, à l’instar de toute autre communauté minoritaire, est prise en sandwich entre son héritage historique et le besoin de s’intégrer au sein d’un monde qui se distingue par sa mosaïque religieuse et, par conséquent, son instabilité politique quasi permanente.
E.C
La présence arménienne au Liban date du XIXe siècle et résulte d'une série de vagues migratoires au cours desquelles les Arméniens ont été forcés hors de leur nation. Ce processus d’immigration a atteint son apogée avec le génocide de 1915.
En 1926, on dénombrait près de 75.000 Arméniens au Liban.
Entre 1937 et 1940, une nouvelle et plus grande vague de réfugiés arméniens est arrivée au Liban à partir d’Alexandrette, suite à l'annexion de cette région par la Turquie et l'évacuation du Sandjak par les forces françaises. L’immigration arménienne a continué dans les années 1940 à partir de la Palestine, suite aux tensions israélo-arabes, et enfin au début des années 1960 en provenance de Syrie en raison de la montée des sentiments nationalistes arabes opposés aux droits culturels et éducatifs des minorités.
Les Arméniens du Liban, sont aujourd’hui des citoyens libanais à part entière. A travers les années, ils ont joué un rôle important dans le maintien de l’équilibre politique et ont contribué à maintenir une «répartition équitable» des postes politiques et administratifs, dans un pays où la paix politique est basée sur dosage savant entre chrétiens et non-chrétiens.
Dans les années qui ont précédés les évènements tragiques de 1975, les Arméniens avaient atteint un degré significatif de prospérité économique. Ils avaient pratiquement monopolisé le commerce du tapis en Orient, grâce à leurs relations privilégiées avec les marchés de Constantinople et de Londres.
Ils se sont aussi distingués à plus d’un niveau : commerce, artisanat, art, science, presse et littérature.
“Industrieux par nature ” les Arméniens sont réputés “spécialisés” dans certains corps de métiers de haute précision. Ils ont excellé comme tailleurs, bijoutiers, coiffeurs, horlogers et cordonniers. En plus de leur remarquable talent d’artisans, les Arméniens ont énormément contribué à l’essor culturel et artistique du Liban, notamment dans le monde de la musique, de la peinture, du cinéma, de la presse et de l’éducation dont le phare est la fameuse université Haigazian, à Ras Beyrouth.
Le Liban est fier de ses artistes tel le comédien Pierre Chammassian appelé le « Docteur en Comédie », le grand compositeur et pianiste dont les prodiges ont fait le tour du monde, Guy Manoukian, l’activiste politique et chanteur-compositeur du groupe américain de rock « System of a Down », Serj Tankian , le peintre Krikor Agopian qui a participé à plus de 125 expositions à travers le monde, une première pour un artiste de la région et qui a été un des premiers à reprendre en peinture le maniérisme humaniste de la Renaissance.
Nul ne peut oublier les années 1960, quand le Liban fut le premier pays Arabe à commencer à envoyer des fusées dans le ciel. Sous l’initiative de l’arménien Manoug Manoukian, un professeur de physique auprès de l’université Haigazian.
De plus, le Liban compte plusieurs stars de télévision de descendance arménienne, qui cartonnent dans la région, tel Paula Yacoubian et Zaven Kouyoumdjian de Future Television, Nishan Derharoutyounian qui a animé des talk-shows populaires sur NTV, LBC et MBC, et la scénariste de Telenovela Claudia Marchalian.
Ceci est le résultat d’une centaine d’années de courage, de persévérance, de travail acharné, d'une grande autonomie et d’une ingéniosité entrepreneuriale - des attributs qui avaient bien servi les Arméniens dans leur longue histoire de survie contre vents et marée.
Toutefois, le bien-être économique n'a pas été accompagné d'un sentiment de contentement et de bonheur. Plusieurs facteurs ont quand même contribué au désenchantement de la diaspora arménienne au Liban, y compris ;
- l’instabilité qui a régné au Liban suite aux hostilités qui ont débuté dans les années 70,
- la peur de ne plus jamais pouvoir retourner dans leur pays,
- la préoccupation persistante à la menace d’une perte de l'identité arménienne,
- le sentiment omniprésent de politique d'impuissance en raison de l'absence d'indépendance nationale, et
- le profond sentiment de perte et d'indignation face à la Turquie pour son refus persistant de reconnaissance du génocide arménien.
En 1983, le Liban comptait près de 175,000 arméniens, la plus grande communauté en dehors de l'Union soviétique et des États-Unis. Ceci explique en partie pourquoi pendant longtemps le Liban fut appelé la « deuxième Arménie ».
Pendant la guerre civile qui a ravagé le Liban pendant 15 ans (de 1975 à 1990), la communauté arménienne a joué la carte de «neutralité positive». Ce qui pendant longtemps n’a pas été apprécié par certaines factions qui voyaient en la guerre une bataille entre musulmans et chrétiens.
Toutefois, la neutralité arménienne a payé. Tout au long des années de guerre, Bourj Hammoud, un quartier à majorité arménienne sur le bord de Beyrouth, est restée intacte, même pendant les plus lourds tirs d'artillerie contre cette partie du territoire. Malgré cela, des milliers de libano-arméniens, comme beaucoup d'autres libanais ont cherché refuge au Canada, aux États-Unis, en France, et dans d'autres pays occidentaux.
Toutefois, la survie des Arméniens n’est pourtant pas dépourvue de défis.
Ils font partie des quelques grands peuples dans le monde, qui comptent plus de membres dans la diaspora que dans leur propre pays.
Pour plus d'une centaine d'années, plus de la moitié des sept millions d'Arméniens dans le monde ont été soumis à des changements et des fluctuations idéologiques, linguistiques, socio-économiques, et plus récemment à la mondialisation, le consumérisme, la situation post-coloniale et post-communiste.
Le rouleau compresseur de la mondialisation qui avance à la vitesse de la lumière et la transformation du monde en un melting-pot culturel, préoccupent au plus haut niveau les Arméniens qui ont peur de perdre leur identité ethnique, linguistique et culturelle, qu’ils ont réussi à préserver, jusque-là, plus ou moins intacts et qu’ils ont défendus à corps et à cris, même au prix de leur sang.
Au Liban, la communauté arménienne, à l’instar de toute autre communauté minoritaire, est prise en sandwich entre son héritage historique et le besoin de s’intégrer au sein d’un monde qui se distingue par sa mosaïque religieuse et, par conséquent, son instabilité politique quasi permanente.
E.C